La Bible dit-elle vrai ?
... Il est donc impossible de retrouver un auteur précis pour chacun des livres. Mieux vaut parler de textes écrits par des communautés de croyants.La Bible dit-elle « vrai » ? Selon le "Petit Robert", est vrai "ce à quoi l'esprit peut et doit donner son assentiment", "une connaissance à laquelle on attribue la plus grande valeur".La question est de savoir si la Bible entre dans cette définition
Vérité scientifique ou vérité qui fait vivre ?
La vérité scientifique est un objet du savoir car elle est cohérente avec la pensée d'une époque donnée. Ce savoir peut être changé par l'acquis d'un nouveau savoir (les astronomes, par exemple, ont longtemps pensé que le soleil tournait autour de la terre...).
La vérité scientifique est de l'ordre du savoir alors que dans la Bible la vérité n'est pas un objet du savoir mais c'est une personne à rencontrer. Je dois me positionner par rapport à cette personne, en qui je peux dire que je crois.
Les auteurs bibliques n'avaient pas pour objectif de dire une vérité scientifique, historique, biologique ou autre. Leur but était tout autre :
ils parlaient de leur expérience d'un Dieu qui se révélait dans leur vie, qui marchait avec eux et transformait leur manière de voir le monde.
Au début, ces histoires étaient personnelles. La personne ayant vécu l'expérience de Dieu la racontait aux autres. Puis, peu à peu, certaines de ces histoires sont devenues les histoires de tous car chacun s’y retrouvait. Elles étaient regroupées et devenaient, longtemps après les faits, un livre de la Bible.
Pour ces anciens, la vérité scientifique n'est pas le plus important. Ils n'ont pas beaucoup de moyens pour y accéder.
Ce qui compte pour eux, c’est la vérité qui fait vivre : vraiment Dieu existe, il aime tous les hommes, il veut pour tous la paix, il met sous leur responsabilité l'harmonie de toute sa création.
Dans la Bible, l'homme peut découvrir que Dieu est à chercher dans sa propre histoire : Dieu n’est pas un concept. Il est, et il sera toujours plus grand que ce qu'une seule personne peut en dire. Voilà pourquoi la Bible est faite d’une multitude d'histoires.Les auteurs de la Bible témoignent d’abord de la présence de Dieu dans leur vie.
Vérité pour qui ?
La Bible fait partie de l’héritage littéraire de l'humanité. Il est normal que différentes lectures en soient faites. Un non-croyant peut voir en elle un écrit d'une époque lointaine qui n'a qu'un intérêt littéraire.
Quant aux croyants juif, musulman ou chrétien, ils ne la situent pas sur le même plan :
- le croyant juif considère que les cinq premiers livres de la Bible (le Pentateuque, la Torah) sont les plus importants. Ils parlent du salut que Dieu promet à l’homme et disent ce que l'homme doit faire pour y avoir part.
- le croyant musulman considère la Bible comme un livre sacré qu’il faut respecter comme il faut respecter les croyants avec lesquels il a une histoire commune (les « gens du Livre »). Mais Mahomet est le seul vrai prophète et le Coran la seule vraie "Parole de Dieu".
- le croyant chrétien voit dans la Bible le témoignage de la révélation de Dieu aux hommes. Pour lui, elle se compose de l’Ancien Testament dans lequel Dieu est présent aux hommes dans leur propre histoire, et du Nouveau Testament qui complète le premier car en Jésus, "Dieu avec l'homme" devient lui-même homme, "homme-Dieu" parmi les hommes. Le chrétien comprend l'Ancien Testament comme l'annonce du Nouveau : Dieu a toujours aimé l'homme, tous les hommes, et en Jésus-Christ il s'est lui-même fait homme.
Les croyants des trois grandes religions monothéistes (croyant en un Dieu unique), judaïsme, christianisme, islam, peuvent s'apporter beaucoup les uns aux autres dans leur manière de lire la Bible.
Nul n'a le droit d'imposer sa vérité car la Bible dit la vérité au croyant qui l'écoute mais la liberté de l'homme, don de Dieu par excellence, doit être sauvegardée. Le chrétien lit la Bible en Eglise, avec d'autres croyants d'hier et d'aujourd'hui et c’est ainsi qu’il peut percevoir la vérité.
Lorsqu’il la lit seul, sans jamais confronter sa lecture à celle d’autres chrétiens, il risque de prendre sa vérité pour la vérité absolue !
L'exemple des récits de la création du monde et la vérité scientifique
Les auteurs des récits de la création (début du livre de la Genèse, premier livre de la Bible), conscients de l'immensité de leur tâche, ne se sont pas contentés d'un seul récit, mais en ont écrit deux.
Ils n'avaient pas la prétention de transmettre le "comment" de la création du monde (personne n'en savait rien, et c’est un événement sans témoin !). Pour eux, il était plus important de dire
"pourquoi" Dieu crée.
Il est intéressant que la Bible commence par ces deux récits.
Le premier est très poétique et le second est un récit presque "naïf". Il n'est pas possible de les faire concorder historiquement.
Le premier raconte la création en sept jours, le dernier jour Dieu « créant » le repos, après avoir tout mis en place. Dieu remet la création à l'homme et à la femme, elle est pour eux, Dieu n'en tire rien et n’en garde rien pour lui-même.
Le second récit reprend tout à zéro. Dieu façonne l'homme avec de la terre, lui insuffle son souffle pour lui transmettre la vie et il se promène avec lui dans le jardin à la recherche de celle qui lui correspondrait car « il n’est pas bon que l’homme soit seul », dit Dieu.
La vérité de ces textes n'est pas d'ordre scientifique : le croyant n'a rien à dire de scientifique à partir de sa foi. De même qu’un scientifique ne peut pas parler de la foi avec des critères scientifiques. Il s'agit de deux types différents de vérité. Ce qui n’empêche pas certains scientifiques d’être croyants, sans qu’ils puissent prouver leur foi à partir de leurs connaissances scientifiques.
Lire la Bible, c'est donc accepter que la vérité dont elle nous parle soit de l'ordre d'une vérité absolue que le lecteur sera toujours invité à découvrir et à quêter sans avoir la prétention de l'atteindre.
Cette vérité se trouve dans le sens profond du texte, non pas dans une lecture "à la lettre". Inutile de chercher à savoir ce qui s'est vraiment passé. La question à se poser est plutôt : « comment ce texte me fait vivre ? »