... à Saint-Jorioz

Histoire de l’église de Saint- Jorioz du 11ème à nos jours

La Chapelle Vieille  

Une église primitive se trouvait au centre de la plaine de Saint-Jorioz, près de l’endroit appelé « chez Tavan ».  C’était là le premier temple chrétien de la contrée, et il n’est pas téméraire de le faire remonter à l’époque où le christianisme s’établit en Savoie. a Chapelle Vieille fut visitée par les évêques au cours de leurs tournées pastorales. Ainsi, le 22 juillet 1618, Saint François de Sales, en visite, ordonnait au prieur d’en faire raccommoder les murailles et de la remettre en bon état dans les deux mois. »
Malgré ces injonctions épiscopales, peu à peu, par la négligence des responsables de son entretien, ce monument des premiers âges chrétiens tombait en ruine. En mars 1791, M. de Maugny, curé de Saint-Jorioz, adressait à l’évêque une requête pour en demander la démolition, invoquant pour raison qu’il est dans « un état indécent, qu’il y pleut de tous côtés… »
Ayant obtenu l’autorisation de démolir, il récupéra les derniers débris des objets du culte qu’il transporta à l’église du prieuré, entre autres une vieille statue de Notre-Dame, assise, tenant l’Enfant Jésus, en molasse fort dure et très lourde.
La place de la « Chapelle Vieille » fut marquée d’une croix de bois, au lieu-dit « chez Tavan », plantée près d'un marronnier, situé sur le petit parking de la "Résidence du Centre".

L’église du prieuré

Le prieuré qu’aurait fondé « le bienheureux Jore » était situé dans un bas-fonds marécageux et insalubre, à 1 km en aval de la Chapelle Vieille. Son territoire formait une surface presque carrée entre lac, Laudon, vieille route de Duingt (par la Croix de Filly) et nant du Villard.
La première mention connue du ce prieuré se trouve dans un acte de donation, qu’on peut dater de l’an 1040, faite à l’Abbaye de Savigny, et qui comprend le prieuré, l’église avec les dépendances qui l’environnent et les parcelles de terre adjacentes.
Saint-Jore est mis sous l’obédience de l’abbaye de Savigny à la même époque que Talloires.
La Chapelle Vieille étant désaffectée, les offices paroissiaux furent célébrés en l’église priorale. Dans cette église, existaient deux parties distinctes, presque égales, dont la plus haute, dédiée à Notre-Dame, servait de chœur aux religieux pour l’office canonial et leurs cérémonies particulières, et la plus basse, séparée de l’autre par une grille, était réservée à la population.. Un autel y était dédié à saint Nicolas et dans un acte de 1710, saint Nicolas est déclaré patron de la paroisse.
Les 12ème et 13ème siècles semblent avoir été l’époque de la plus grande fortune du prieuré. Il reçoit de nombreux dons, de bienfaiteurs tels que les seigneurs propriétaires du château de Villard-Chabod.
L’union canonique du prieuré de Saint-Jore à celui de Talloires  fut réalisée en 1397 à l’époque où, depuis longtemps déjà, s’accentuait le désordre introduit dans les prieurés par le rétablissement de la propriété personnelle au profit du Prieur et des dignitaires claustraux. La vie commune, qui est la forme indispensable de la discipline monastique, avait fait place à la licence de posséder en propre des terres, vignes, redevances, juridictions,… le prieur lui-même, les dignités du prieuré, étaient de véritables seigneurs, cherchant à accaparer, non seulement les revenus du prieuré lui-même, mais encore les revenus spécialement affectés aux offices conventuels.
Le désordre avait grandi pendant deux siècles, en 1696, une requête fut adressée au roi en ce sens.
L’église est déjà vieille et abîmée, et déjà en 1760, il était question de ramener le lieu paroissial dans la belle plaine.
Enfin, par convention du 25 novembre 1766, il fut décidé que les religieux se retireraient pour de bon à Talloires, que le curé succéderait à leurs droits et charges, assumerait l’entretien.
C’et le Révérend Pierre Besson, institué curé de Saint-Jorioz en avril 1820, qui mit en route le projet de reconstruction de l’église dans un lieu plus salubre et surtout plus central, reconstruction réclamée par le plus impérieux des besoins. Mais malgré tous ses efforts, le projet n’aboutit pas de son vivant. Il mourut le 30 novembre 1862, sa tombe est dans un coin du cimetière abandonné, près du lac.
Le 14 septembre 1884, on célèbre la dernière messe à l’église du prieuré. Aujourd’hui, du prieuré et de son église détruite en 1885, il ne reste que quelques tombes ecclésiastiques dans l’ancien cimetière, lieu que l’on appelle actuellement « la vieille église ».

Pendant la révolution

La Savoie, envahie par l’armée française le 22 septembre 1792, vit appliquer à ses prêtres les lois qui frappaient le clergé de France.
Les  prêtres réfractaires refusant de prêter serment à la constitution s’étaient expatriés. Jean Nicolas Deletraz, syndic (= maire) de Saint-Jorioz, eut le courage de les remplacer auprès des berceaux et des lits de mort de1793 à 1797.
Les cloches de l’église furent descendues et transportées à Annecy, mais trois habitants s’ emparèrent de l’une d’elles et la ramenèrent plus tard à la paroisse.

Etymologie de Saint-Jorioz

L’appellation vient du nom du « Bienheureux Jore » qui a fondé le prieuré sur le bord du lac, bien avant  l’an 1016. ce lieu prit son nom, puis devint Saint Joro. Au 17ème siècle, pour enjoliver ce nom, on trouve l’adjonction d’un « z ». Dans tous les actes notariés de ce siècle, St-Jorioz est inscrit tel qu’il est aujourd’hui.

La « nouvelle » église

En 1883, le maire François Siméon donne un avis favorable pour la construction dans la grande plaine.
Les travaux commencent un an plus tard. A 1 m 50 de profondeur, sur un lit de briques et de maçonnerie, ont été retrouvées des pièces de monnaie portant le nom de St Augustin le Preux, devant dater du 2ème siècle après Jésus Christ.
Le chanoine Poncet, vicaire général pose et bénit, sur délégation de l’évêque d’Annecy, la première pierre de l’église paroissiale le 16 avril 1885.
Et le 31 octobre 1886, l’église néogothique est enfin livrée au culte et bénie par le même chanoine.
Un cyclone abat le clocher,  le 23 février 1935, juste après la sortie du catéchisme. 1961 : les bancs sont remplacés.

En 1981-1982, le conseil municipal décide de la rénovation du bâtiment et s’engage à ce que les travaux soient terminés en 1986, année du centenaire de l’église. Le 7 septembre de cette année, effectivement, une cérémonie réunit habitants et paroissiens.
Le 29 mars 2000, la commission diocésaine d’art sacré se déplace et accepte la rénovation des 14 stations du chemin de croix.  « Ce chemin de croix est signé  Fabisch, peintre d’origine alsacienne. Le matériau utilisé est du plâtre, ce qui permet de penser qu’il avait été fabriqué en série à partir d’un moulage. L’iconographie est très traditionnelle, celle que l’on trouvait couramment au 19ème siècle (période du style « Saint-Sulpice).
Un artiste local,  Hervé Burret, est chargé de sa restauration. « …l’artiste a respecté les couleurs d’origine tout en ajoutant sa note personnelle. La technique utilisée est celle de l’acrylique donnant des tons assez vifs. …».
Le 24 mars 2001, les 14 stations, après une restauration fort réussie, ont repris leur place à la grande satisfaction de la communauté.
Lors de restauration du bâtiment, les vitraux sur lesquels on pouvait voir saint Nicolas, patron de la paroisse, avaient été remplacés. Beaucoup de paroissiens et de nombreux visiteurs s’inquiétèrent de l’absence de la représentation du saint dans l’église.
Une petite équipe réfléchit sur le style qui correspondrait au plus près à la statuaire existant dans l’église. Un artiste fut recommandé pour la qualité de son œuvre et avec l’accord du conseil de gestion, et après avis de la commission diocésaine d’art sacré, la commande fut passée à Jacques Balsat, artiste et diacre dans le Chablais.
L’inauguration de la statue de notre saint patron fut l’occasion d’une célébration conviviale le 7 décembre 2002.

Quelques mots sur saint Nicolas

Il est né vers l’an 270 à Patras en Lycie. Il a été élu évêque de Myre en Asie Mineure.
De sa très riche légende, deux épisodes sont particulièrement célèbres : la dotation des trois jeunes filles et la fable des trois enfants ressuscités. En réalité, cette histoire serait tirée d’un autre fait : trois officiers faussement accusés et  injustement condamnés à mort auraient été arrachés au glaive par saint Nicolas, apparu en rêve à l’empereur Constantin.
De nombreux miracles lui furent attribués : ils se rapportent à la mer et au sauvetage des marins, ce qui explique que saint Nicolas soit le patron des marins et des voyageurs.

Cette histoire de notre église a été écrite en 2003 par Gisèle Fontaine (1927-2015)  à l'occasion des journées du patrimoine (dont le thème était "patrimoine spirituel". Elle l'avait écrite à partir des archives paroissiales, du  livre d’Auguste Giroud « Pages d’histoire locale » (1962), lui-même un résumé de la « Monographie de la paroisse de Saint-Jorioz » par l’abbé Lavanchy (1893).