Dimanche 22 octobre 2024 - 29e dimanche du Temps de l’Eglise
Monnaie courante.
Au milieu de la place on sortit une pièce de monnaie, elle passa d’une main à l’autre et comme pour pile ou face on constata, bien sûr, que la pièce liait recto et verso ! Une histoire à avoir la tête qui tourne ! Mais ce fut aussi une page d’Evangile qui s’écrivit ! Ce fut même ce jour du fameux : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ! » Depuis, cette pensée roule aussi bien dans la cité que dans l’Eglise. C’est même là, un des rares textes évangéliques qui prenne position sur la question du statut du politique.( )
Nous nous laissons facilement embarquer dans la perspective de deux réalités que nous opposons régulièrement : une basse politique et une noble politique.
Cette fameuse « politique » dite politicienne, mettant en scène différents partis en rivalité et des personnes qui s'occupent de politique à titre professionnel, en connaissant et utilisant tous les codes et intrigues.
Et puis, la « Politique », issue du grec ‘polis’, qui envisage globalement la cité organisée !
Question : Jésus ferait-il de la politique ?
Tout le monde a entendu, un jour, reprocher de faire de la politique à un évêque, à un curé et même au pape qui « nous parle d'immigration et qui a tendance à nous culpabiliser un peu... » - parole d’un politique !
Mais depuis longtemps la Bible est explicite : « Recherchez la paix de la ville où je vous ai déportés et intercédez auprès de l’Éternel en sa faveur, parce que votre paix dépendra de la sienne. » Jérémie 29:7.
Il se peut bien sûr que bien des chrétiens hésitent à prier et œuvrer pour la paix dans un pays où ils ne se sentent pas, ou plus, chez eux, ou qu’ils entretiennent les troubles, fomentent la conspiration et se réjouissent de dresser les uns contre les autres. En même temps des concitoyens nous disent : « Nous avons besoin de vous (les chrétiens) pour lutter contre la précarité, le « séparatisme » dans certains quartiers. Vos communautés contribuent à apaiser le climat social là où elles sont implantées ».( )
Sur la place publique où brille recto-verso la pièce, l’une des faces porte une valeur ; ici il est question de la valeur de l’impôt dû à la société, car il s’agit de s’occuper de la société et du vivre-ensemble. Sur l’autre face, une effigie. Ce fut jadis l’effigie d’un dieu romain, puis celle de César considéré comme un dieu, et dans l’évangile c’est Dieu qui est considéré ! Ce coup de la pièce sur la place publique qui tourne et se retourne a pour visée de piéger Jésus : le contraindre à choisir ou bien Dieu ou bien César. En quelque sorte les mettre sur un pied d’égalité ! Jésus signifie qu’il n’y a aucune commune mesure entre Dieu et César, et qu’il suffit de rendre à l’un la monnaie qui lui appartient, et à l'autre de rendre la gloire qu'il est seul à pouvoir revendiquer.
Ici s’enracine la dichotomie entre citoyen du ciel et citoyen de la terre, deux réalités qui s’attirent l’une l’autre.
En effet comment se soucier du bien commun des citoyens, des garanties des libertés, de la protection des personnes, de la création, et en même temps vivre de la fraternité née de la reconnaissance d’un seul Père !
Nous y voyons donc deux réalités, l’une spirituelle et l’autre temporelle, qui doivent être maintenues séparées, à l’image de la loi de 1905 qui interdit la tenue de réunions politiques à l’intérieur des édifices cultuels...
Espérons que la monnaie résiste à la vague de démonétisation qui déferle, au risque de ne plus pouvoir choisir son camp, avec ses piles ou faces, de plus pouvoir contribuer à l’impôt du vivre-ensemble, de ne plus pouvoir échanger, et même de risquer d’effacer l’effigie des hommes et des femmes, l’image même de Dieu, l’homme ! F Thierry Mollard osfs
Ces lieux de fracture
Dans ma boîte est tombé ce texte, je ne veux pas le garder pour moi... Il résonne avec l’actualité géopolitique et locale quand on parle de l’église, la famille, la paroisse... Extrait des « Roses dans le sable : journal d'un curé au Sahara » (Raphaël Deillon, 2003, Algeria, Southern)
"L'Eglise n'est pas une organisation internationale, une multinationale qui s'implante quelque part et qui retire son personnel quand ça ne va plus. C'est le lieu d'une Alliance passée entre le Dieu de Jésus-Christ et une humanité particulière. Les chrétiens qui sont là sont là pour entrer dans cette Alliance. Quoi qu'ils fassent, ils sont là pour cette Alliance d'Amour avec cette humanité particulière. En entrant dans cette Alliance, chaque personne sait qu'elle devra y être fidèle pour le meilleur et pour le pire. (...) Jésus s'est placé sur des lieux de fracture, là où c'est cassé, là où il y a tensions et il en est mort ! Si nous, chrétiens, ne sommes pas présents sur ces lieux de fracture, eh bien on n'est plus chrétiens. Fracture entre le Nord et le Sud, entre les riches et les pauvres… Ce n'est pas uniquement des vérités à chanter dans la liturgie, il faut les vivre ! »
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