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Dimanche 10 mai 2020 : 5ème Dimanche de Pâques — Année A
Les pingouins de l’an 1 du confinement !
C’est connu, à tort ou à raison, le coronavirus, nommé SARS-CoV-2 aurait été hébergé chez la chauve-souris avant d’être transmis à l'homme via le pangolin, pour en définitive faire de nous des pingouins ! En effet avec l’arrivée soudaine et subtile de ce virus, du jour au lendemain on a dû passer son temps à se laver les mains à la manière d’un chirurgien : enlever bagues, bracelets et montres, réduire la longueur des ongles courts, relever les manches, pour jouer des coudes ! Comme les pingouins ! Alors, fatalement, l’agenda s’est vidé, le temps s’est dilaté, le silence est tombé, le ciel s’est vidé de tous panaches blancs des avions, désemparés il fallait se rassurer !
Le goupillon sur le toit !
Et la nature ayant horreur du vide, nous avons eu le temps de regarder, écouter et nous laisser épater par des initiatives surprenantes : l’abondance de messes selfies, les retransmissions de messes TV en faux huis clos où les lectrices ne sont même pas invitées à communier. Par ailleurs Jésus a pu prendre de la hauteur avec une sortie d’Ostensoir en hélicoptère. Un prêtre qui asperge le parvis vide depuis le toit de son église. Une église où chaque fidèle virtuel avait pris place par portrait photo interposé sur le banc de la nef ! Impressionnant vendredi saint à Rome avec François, seul, sur le dallage de Saint-Pierre.
Autant d’idées pour ne pas s’en laisser compter par un virus ! A partir de là certains espèrent en sortie de confinement, une créativité (re)-trouvée promettant des jours illuminés ou disent les jeunes flippés et destroys. D’autres, au contraire, auront hâte de retrouver le doux ronron des prêchi-prêcha de l’amour et des bonnes vieilles habitudes ? Le déconfinement se profile. L’avenir dira !
Je fais partie de ceux qui espèrent que le monde d’après apportera un nouveau souffle. Mais ce ne sera pas par magie, ni la conséquence automatique de la période de confinement.
Cette espérance est liée aux racines même de l’Eucharistie, au « faites ceci en mémoire de moi ! » Il s’agit de « faire Corps avec Jésus » et de se laver les pieds les uns des autres, fondamentalement se mettre au service, c’est l’Evangile de Jean. Nul besoin de rituel, ni liturgie, ni d’église, pour cela il suffit de se mettre en chemin : l’engagement suffit, et il est vital.
Vital oui ! Certains sur la paroisse ont allumé une lumière, modeste cierge pascal, ont ouvert le Livre, ont rassemblé autour d’eux, prié, en un mot ils ont célébré, d’une manière ou d’une autre ! Certains ont sorti le Pain du jeudi Saint, pour le rompre et partagé avec celles et ceux qui étaient autour de la table ! Certains sont eux-mêmes sortis, eux-mêmes, au risque même d’écoper d’un PV... oui ça s’est passé comme cela sur notre paroisse... ils ont pris le temps, le souci d’aider, de rencontrer et de mille autres gestes qui apportent un moment de présence réelle !
Le sacrement du frère a pris un sacré élan
Et voilà que maintenant j’entends parler de célébrations clandestines ! S’agit-il de célébrations proposées au mépris des lois de l’urgence sanitaire, ou littéralement des célébrations qui se sont faites en secret, concoctées en cachette, enfin derrière les murs des maisons et... sans prêtre ?
Tout est en lumière ! N’y a-t-il pas, de la part de quelques évêques, mépris et peurs vis-à-vis de ce qu’ils appellent « célébrations clandestines » qui ne seraient que des célébrations domestiques qui ont fleuries ici et là, pour répondre au confinement imposé. Je crains finalement ces semonces troublantes et ambigües : « Que la vie sacramentelle doit repartir elle aussi ! » ... La belle affaire ! Mais s’est-elle arrêtée ?
Il suffit de tendre les oreilles, de voir les gens aux mains gantées, la bouche débordante des chansons, et les bras chargés, faire preuve de générosité et de fraternité, de soucis de l’autre ! Le sacrement du frère a pris un sacré élan durant ces jours de crise et pour sûr, cela ne s’est pas fait dans le secret. Sans devenir ostentatoire, ni se faire en cachette, sans devenir glorieux, cela s’est fait juste à la manière de « héros discrets des jours ! »
Le « syndrome de Raoult »
En effet pour soigner ce virus de la peur, on a un vaccin ! On l’a oublié ! Forcément il est vieux. Il a émergé dans les
années 340, il se nomme Chrysostome, nom d’un archevêque, dont on ignore s’il avait rang de préfet romain
mais qui avait comme évêque « la capacité d’être aussi prudent et responsable qu’un préfet ! » Figurez-vous que Saint Jean Chrysostome, Père de l’Eglise, parle avec autorité de deux sacrements indissociables : "le sacrement de l'autel" et "le sacrement du frère" : « La liturgie sans courage devient contre-témoignage... Tu veux honorer le Corps du Christ ? Alors, ne l'honore pas ici, dans l'église, avec des vêtements liturgiques tandis que tu le négliges au dehors où il est nu et à froid... A quoi sert-il de charger la table du Christ de coupes d'or alors que lui-même meurt de faim ? » « D'abord, nourris-le quand il a faim et, après, utilise les moyens qui te restent pour orner sa table. »
« Il est heureux de... »
Oui il est heureux de se prendre par la main (méthode avec barrières, sans se serrer la main) pour écrire l’avenir !
Une chance nous est donnée ! Chance à saisir !
Jusque-là nous avons beaucoup donner dans la routine ! Et la routine s’est brisée ! Il est à parier que la pandémie ne soit pas qu’une parenthèse.
Le cercle vicieux des reproductivités oiseuses s’ouvre en vecteur tendu vers un avenir ! Mais bander un arc n’est pas chose facile, surtout que beaucoup ne s’entraine plus ! Alors oui, il y a là un sens à trouver et retrouver ! On appelle cela le monde d’après... qui se prépare aujourd’hui ! N’ayons pas peur !
Pour cela il nous faut éviter de perdre du temps dans la critique irresponsable des pouvoirs publiques, mais préparer la réouverture, pour cela il faut se prendre par la main, prendre des décisions et s’organiser. Ah oui c’est sûr le risque d’être critiqué en retour est garanti ! Je vous renvoie au communiqué de l’envoi exceptionnel (5/05/2020)
P. Thierry Mollard, osfs
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